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CIDH AFRICA

Les défenseurs des Droits Humains en temps du Covid19 – focus sur l’Afrique du Nord

La pandémie de COVID-19 et les mesures prise par les États face à cette situation représentent un ensemble de menaces pour les défenseurs des droits humains.

De nombreux États à travers la planète, y compris ceux qui plaident depuis longtemps pour la protection des droits humains, prennent pour cible ces militants et d’autres voix critiques qui critiquent la gestion de la crise sanitaire publique. Par conséquent, dans bien des régions du monde, les autorités s’en prennent à celles et ceux qui osent remettre en cause les stratégies gouvernementales inadéquates.

Certains Etats utilisent les mesures liées au COVID-19 et d’autres lois existantes pour réduire au silence les défenseurs des droits humains.


Dans les pays où les autorités violaient les droits humains bien avant la pandémie, la crise a fourni un nouveau prétexte pour continuer de fouler aux pieds ces droits et attaquer les défenseurs des droits humains et les individus considérés comme des opposants. Elle a encore plus mis en lumière la nature politique de la détention des défenseurs abusivement emprisonnés avant la pandémie. En effet, alors que des milliers de prisonniers à travers le globe se voient accorder une libération anticipée, conditionnelle ou temporaire en raison des risques liés au COVID-19 dans les prisons surpeuplées, un grand nombre de défenseurs a été exclu de ces programmes et reste injustement derrière les barreaux, subissant ainsi une sanction supplémentaire pour leur militantisme.


La pandémie a davantage permis aux gouvernements de harceler et d’intimider ses détracteurs et les défenseurs des droits humains. Des législations d’urgence adoptées les a conférer des pouvoirs exceptionnels pour affronter la crise. Celles-ci punissent « la création, la propagation ou la diffusion de fausses informations » de deux mois maximum de prison et de lourdes amendes. Des bureaux nationaux d’enquête ont ainsi convoqué des personnes qui avaient critiqué la réaction du gouvernement à la pandémie pour avoir supposément partagé des « fausses nouvelles » relatives au COVID-19.


Des policiers et les autorités locales ont abattu les manifestants ou les personnes qui remettent en cause les décisions gouvernementales lorsqu’ils causent des troubles dans le contexte de crise. Ils ont encouragé les représailles à l’encontre des défenseurs des droits humains, de ses détracteurs et des médias indépendants.

Des journalistes ont été déclarés coupables de diffamation en ligne. Tandis que les populations se battaient contre les répercussions du COVID-19, les autorités ont adopté une législation anti-terrorisme comprenant une définition générale et vague du terrorisme, selon laquelle même les critiques les plus modérées peuvent être considérées comme une action terroriste. Des journalistes ont été appréhendés par les forces de sécurité et contraint de supprimer les images qu’il avait enregistrées pour des documentaires qu’ils préparaient.


Les autorités ont déclaré que les journalistes devraient rester chez eux et se conformer aux mesures nationales de confinement. Elles estiment qu’ils ne fournissent pas un service indispensable et indique que seuls les journalistes des services de diffusion (généralement contrôlés par le gouvernement) sont autorisés. Des journalistes ont été arrêtés pour « diffusion de données pouvant troubler l’ordre public » après avoir publié des messages sur Facebook. Les charges qui pèsent sur les journalistes sont fondées sur la Loi relative à la cybercriminalité de 2019. Ces lois sont utilisées pour restreindre le droit à la liberté d’expression pendant la crise liée au COVID-19. Certains ont été arrêtés et détenu après avoir partagé sur WhatsApp des documents public critiquant les mesures prises par le gouvernement pour enrayer la propagation du virus.


Certaines restrictions des déplacements ont été prolongées indéfiniment. On assiste à des manifestations pour fustiger la faim qui se fait de plus en plus présente et l’orientation de l’aide alimentaire gouvernementale à des buts politiques.

Des opposants politiques ont été enlevés et martyrisées, y compris sexuellement, pour avoir pris part à ces manifestations. Des femmes ont été accusées de participation à des rassemblements avec l’intention de fomenter la violence publique, les troubles à l’ordre public et le fanatisme.

Les rassemblements de plus de 1 000 personnes ont été interdits et d’autres mesures ont été prises pour lutter contre la pandémie.


Les gouvernements ont utilisés les lois d’urgence pour censurer et violer le droit à la liberté d’expression en période d’instabilité politique. Les pouvoirs d’urgence adoptés depuis mars 2020 pour faire face au COVID-19 ont été détournés pour cibler les militants politiques et les défenseurs des droits humains en vue de leur interdire d’exercer leurs droits à la liberté de réunion pacifique et d’expression. Ils ont été utilisés aussi pour lancer des poursuites à leur encontre, même lorsque les manifestants prennent des précautions et respectent les restrictions de santé publique en mettant en place des mesures comme la distanciation sociale et le port de masque pendant les rassemblements. Les autorités ont invoqué le décret d’urgence pour arrêter, convoquer ou inculper des personnes pour avoir participé à plusieurs manifestations pacifiques qui visaient notamment à marquer des anniversaires politiques et réclamer des enquêtes sur des atteintes aux droits humains.


De même, des groupes locaux de défense des droits humains ont indiqué que les autorités les harcelaient et les menaçaient de les accuser de fomenter des manifestations pacifiques ou d’y prendre part en cette période.

Des militants ont été arrêtés sur la base d’accusations infondées de « vol et cambriolage » pour avoir mis des affiches accusant le gouvernement de manipuler les chiffres du COVID-19. Les charges qui pèsent sur eux semblent être un message pour celles et ceux qui osent critiquer les autorités.

Plusieurs cas de représailles ont été rapportés concernant des soignants et des défenseurs des droits humains qui avaient opiné sur la gestion de la pandémie. Certains militants et lanceurs d’alerte ont été pris pour cible pour avoir formulé des inquiétudes quant à la pénurie d’équipements nécessaires, au manque de formation, aux faibles salaires ou aux conditions de travail dangereuses

À travers le monde, les défenseurs agissent malgré les obstacles, notamment les agressions physiques et verbales, la criminalisation de leurs activités, la discrimination et les restrictions qui pèsent sur les droits à la liberté d’expression, de réunion pacifique, d’association et d’accès à la justice. Certains de ces obstacles existaient déjà, d’autres sont apparus ou sont devenus plus prégnants dans le cadre de la pandémie. Pour résister et poursuivre leur action nécessaire malgré ces difficultés, les militants ont dû mettre à profit leur expérience de travail dans des environnements complexes et leurs ressources en termes d’adaptabilité, d’auto-préservation et de soutien solidaire au sein de leurs communautés et réseaux.

Cela ne décharge toutefois pas les États de leur obligation de protéger et reconnaître les défenseurs des droits humains. S’ils ne leur offrent pas un environnement sûr et favorable pour qu’ils puissent contribuer à réfléchir à une réponse respectueuse des droits humains, le monde subira de plein fouet la pandémie et ses répercussions.

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